L'EFFET MIROIR...


Je voudrais revenir sur cette notion d’effet miroir dont on parle tellement dans le milieu du développement personnel, et qui, pour moi, a été détourné de son sens, car mal compris.
Il est temps, il me semble, de bien redéfinir cette notion.
« Si tu vois tel défaut chez l’autre, c’est, en fait toi qui a ce défaut ». Voilà ce que, en substance, nous disent les ayatollahs du développement personnel New-âge. C’est-à-dire, qu’à chaque fois que je perçois quelque chose qui va mal chez l’autre, en fait c’est en moi… Cette notion étant parfois déformée au point de dire (avec le ton calme et posé qui sié bien) : « Tu sais, si ce que je te dis t’agace, c’est que c’est juste ! » !!!
Ce n’est pas totalement exact, et c’est, je pense, un raccourci trop facile. Le phénomène est beaucoup plus complexe que ça.

Pourquoi parle-t-on d’effet miroir ?

Quand on dit « effet miroir », ce n’est en fait pas vraiment un miroir, c’est une façon imagée de dire les choses. C’est plutôt une manière simple de nous dire d’apprendre à se regarder.
Ça part d’une notion toute simple qui est que quand nous regardons le monde, l’extérieur, nous le regardons à travers nos filtres, notre paire de lunettes, à travers notre propre vision du monde.
Ces filtres nous nous les créons avec ce que nous sommes, c’est-à-dire avec notre vécu, nos expériences, nos croyances, et tout ce qui fait notre système de pensée… Finalement, on regarde le monde avec ce que l’on connaît déjà : en effet, comment pourrait-on qualifier quelque chose que l’on ne connaît pas ! 

« Nous ne voyons pas le monde tel qu’il est, nous le voyons tel que ce que nous sommes » Emmanuel Kant.

C’est pourquoi, par exemple, une femme enceinte a l’impression de voir beaucoup de femmes enceintes autour d’elle, ou, qu’un homme qui souhaite changer de voiture, remarquera plus de voiture identique à celle qu’il veut. En réalité, il n’y en a pas plus qu’avant, mais comme ce sont des évènements très présents à l’esprit, nous les remarquons plus facilement.
Quand nous regardons l’autre, le même phénomène est à l’œuvre : nous le passons à travers nos filtres. Nous ne voyons donc pas l’autre tel qu’il est, mais tel que nous percevons à travers nos filtres, à travers, finalement, ce qui fait qui nous sommes.
De plus, nous ne le voyons pas dans son ensemble, mais seulement en partie. Et cette partie correspond exactement à la partie qui est contenue en nous.

« Ce que j’observe de l’autre est un reflet de moi dans la mesure où c’est quelque chose qui m’appartient que je peux percevoir à l’extérieur, chez l’autre » – Franck LOPVET
Ce n’est donc pas ce qu’il est, mais ce que nous comprenons de lui qui est lié à nous.

Où est le piège ?...

Le souci, avec ces jeux de miroirs, c’est que, la plupart du temps, on ne regarde pas ce que l’on comprend de l’autre ; on le qualifie. Et quand on qualifie, à aucun moment on ne peut voir le miroir, on ne peut le comprendre.  
Prenons un exemple : Si je vois quelqu’un de mauvaise foi et que je le qualifie - « il est de mauvaise foi » - je ne peux pas voir le miroir car « non, vraiment, moi, je ne suis pas de mauvaise foi, je dis ce que je fais et je fais ce que je dis… ». Qualifier l’autre c’est montrer à quel point je ne suis pas comme lui, c’est dire : « regardez, moi je ne suis pas comme ça ! ».
Donc, de facto, en qualifiant l’autre de la sorte, le processus s’arrête et je suis alors incapable d’aller au-delà. C’est de là, d’ailleurs que découle cette mauvaise interprétation de l’effet miroir : on croit que l’effet miroir est dans la qualification. Et c’est, en général, à ce moment qu’intervient le « guide spirituel » (qu’il soit intérieur ou extérieur) et qui nous dit le fameux « Si tu/je penses que l’autre est de mauvaise foi, c’est, en fait toi/moi qui est/suis de mauvaise foi » …

Et comment l’éviter…

Simplement en observant et non en qualifiant. Lorsque j’arrête de qualifier l’autre et que je regarde ce qu’il est réellement en train de faire, je vais pouvoir m’apercevoir que si il est de mauvaise foi, c’est peut-être parce qu’il a peur d’être rejeté quand il se montre faillible, et que derrière cette peur, au fond, se trouve la peur d’être rejeté par son père… Et là, d’un seul coup, je peux voir, moi aussi que j’ai la peur d’être rejeté par papa et que je fais tout pour lui plaire… Là le miroir s’applique !
En fait, nous ne sommes pas tant en miroir sur nos comportements, nous sommes en miroir surtout sur ce qui sous-tend nos comportements. C’est à dire l’énergie – autrement dit nos peurs, nos blessures, nos traumatismes ; nos comportements n’étant que des stratégies que nous mettons en place pour y palier. Des stratégies qui, à énergie équivalente, diffèrent totalement d’une personne à l’autre. Et à l’inverse, à stratégie identique, la blessure de base peut être différente.
Nous comprenons donc que l’affirmation « Puisque tu vois ce défaut chez moi, c’est qu’il est en toi » est une déformation et une simplification de ce qu’est l’effet miroir. C’est de l’ordre du « c’est celui qui dit qui y est ».

Serge DEMANGEAU
www.ecoute-psycho-sophro.fr
De soi à Soi

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